En ce premier week-end de l'année, Elana n'avait pu s'empêcher de se lever tôt pour aller courir, conditionnée par des semaines d'entraînements paternels. Au fil du trimestre, son excellente hygiène de vie allait certainement pâtir de son manque de temps mais, pour l'instant, sa volonté arrivait encore à prendre le dessus sur son envie de profiter de quelques heures de sommeil supplémentaires. Pourtant, elle savait pertinemment que ce luxe deviendrait de plus en plus utopique à mesure que leurs ASPICs approcheraient.

Refusant de penser à cette échéance, la jeune femme gravit la volée de marches menant à la volière. Encore vêtue de sa tenue de sport - fabriquée sur mesure par Mme Guipure pour ne pas offenser son père - et terminant à peine son entraînement, elle avait pris la résolution d'écrire une lettre à ce dernier pour le tenir informer. Elle ignorait si ses missives suscitaient un quelconque intérêt chez Tom ; il n'avait jamais daigné y faire la moindre allusion durant ses séjours au manoir. Néanmoins, cette tâche était devenue une routine à laquelle elle aurait eu du mal à renoncer. Elle couvrait donc des dizaines de rouleaux de parchemins par an, qu'elle expédiait inlassablement à son père à des heures indues pour ne prendre aucun risque. Nul doute qu'un élève l'entendant prononcer le nom du Mage Noir de triste réputation n'aurait eu aucun scrupule à la dénoncer au Ministère. Ici, une grande majorité de personnes avaient déjà subi les conséquences de ses ambitions et beaucoup espéraient trouver vengeance. Et Elana aurait constitué une cible parfaite.

La volière n'avait jamais été un endroit agréable aux yeux de la Serpentard. Ouverte aux quatre vents, elle frigorifiait les plus endurcis de ses visiteurs mais continuait de les imprégner d'une odeur pestilentielle, mélange d’excréments, de poussière et de plumage sale. Le pépiement de ses habitants ne faisait rien pour la rendre plus accueillante et Elana ne s'y rendait qu'en cas de réelle nécessité. Il lui arrivait d'ailleurs de regretter son refus de posséder un oiseau, ayant préféré à l'époque la grâce des félidés à l'utilité de ce dernier.
Par conséquent, elle se hâta de choisir un volatile, de lui attacher la missive à la patte et de lui souffler le nom du destinataire. Obnubilée par son désir d'aller vite, elle ne prêta aucune attention au reste et ne remarqua pas immédiatement la présence d'une intruse dans la volière. Ce n'est qu'une fois l'oiseau disparu à l'horizon qu'elle daigna se détourner de l'extérieur et manqua de justesse de faire une attaque en découvrant une chevelure rousse, mal dissimulée derrière la porte.

« J'espère pour toi que tu te nommes Lily Evans. »

Elle avait parlé d'une voix sèche, impeccable de fermeté, mais son coeur battait la chamade contre sa poitrine et elle avait du mal à maîtriser sa respiration. Même si une parcelle de son esprit parvenait à espérer encore, la jeune femme savait pertinemment qu'il n'y avait aucune chance pour qu'il s'agisse de Lily, l'une des rares personnes à connaître sa véritable parenté. Et, en supposant qu'elle réussisse à faire oublier à cette intruse qu'elle envoyait du courrier à Voldemort, elle ne doutait pas un seul instant de la désapprobation de celui-ci. Elle allait se faire tuer.