De tous les désagréments que pouvait amener la scolarité, les rentrées étaient certainement les pires. Surtout celle de Septembre. Surtout aux yeux d'Elana Wild.

Après deux mois de liberté, elle trouvait cruel d'être ainsi replongée dans un univers aussi peu passionnant que Poudlard. Les intrigues amoureuses, les ragots scabreux, les comportements voyeuristes et tapageurs de ses camarades ... Tout avait le don de l'agacer. Le simple fait d'avoir dû faire sa valise avait commencé à assombrir son humeur mais elle ne prenait réellement conscience de l'horreur que représentait l'école qu'en se retrouvant confrontée à ses macaques de condisciples.
Bien entendu, certains étaient dignes d'intérêts. Sauf que la plupart de ceux-là avaient passé leur été au manoir Jedusor. Autant dire qu'elle ne les avait jamais vraiment quitté, même si elle avait fait parti des rares élus envoyés régulièrement en mission.
Ne restait que les Gryffondors mais, dès le premier jour, il aurait été idiot de jouer les rebelles. Frayer avec cette population n'était jamais accepté, tout juste toléré pour les personnes issues de familles influentes qui, en règle générale, étaient bien les dernières à souhaiter ces rapprochements. En tant que fille unique du Mage Noir de leur époque, Elana faisait, plus que figure d'originale, tâche dans ce milieu si fier de son rang et de la pureté prétendue de son sang. Aussi préférait-elle mettre son orgueil de côté pour quelques jours et accepter de se plier à l'étiquette de sa maison.

Par conséquent, la jeune femme s'était installée au fond du train, dans un compartiment qui attirait rarement les nouveaux élèves et que la préposée aux friandises oubliait parfois de visiter. Pas que cela dérangea Elana, avide de solitude en cette journée invariablement affreuse, mais elle n'aurait tout de même pas dit non à un sachet de Patacitrouilles, seule sucrerie ayant le pouvoir de lui remonter le moral. Encore vêtue de sa panoplie moldue, elle observait le paysage défiler derrière la vitre du wagon, peu pressée de voir apparaître le château. A ses côtés, Rabastan Lestrange paraissait absorbé par un obscur traité sur les arts ténébreux tandis que Narcissa Black dévisait tranquillement avec une camarade de sa promotion dont Elana ignorait le nom, ce qui lui importait d'ailleurs très peu. Elle était la seule à ne pas s'être changée et, de temps à autres, elle pouvait sentir le regard désapprobateur du cadet Lestrange se poser sur son short déchiré ou sur ses bottes lacées.

« Je sais qu'il fait bien chaud pour porter de telles chaussures mais, maintenant que tu l'as constaté, est-ce que tu pourrais cesser de me fusiller du regard ? »

Malgré son agacement, Elana avait parlé d'une voix posée, quoique légèrement ironique. Elle respectait trop son camarade pour se disputer avec lui ou s'offusquer réellement de ses idées reçues. Même en ayant passé son été à exécuter les ordres du Maître à la perfection, sans jamais rechigner ou faire preuve d'états d'âme, elle n'avait visiblement pas acquis sa légitimité aux yeux de son ami. Ni à ceux de ses autres condisciples qui désapprouvaient vivement ses fréquentations. Néanmoins, aucun d'eux n'aurait pris le risque de la dénoncer à Voldemort, pour la simple et bonne raison qu'ils ne pouvaient être sûrs de sa réaction. Qu'adviendraient-ils d'eux s'il décidait de se ranger du côté de son unique héritière ? Leurs fantasmes morbides à ce sujet suffisait généralement à calmer leurs ardeurs de collaborateurs zélés.

Lasse d'observer le paysage, Elana se détourna de la fenêtre et se pencha par dessus l'épaule de Rabastan. Elle aimait le taquiner, toujours assurée d'une réaction de sa part, mais elle n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche, doublée par le fracas que fit la porte de leur compartiment en s'ouvrant. Appuyé contre le chambranle, James Potter l'observait, une lueur malicieuse dans le regard. Un peu en retrait, Black faisait mine de repartir ce qui surprit suffisamment la jeune femme pour qu'elle daigne lui accorder plus qu'un simple regard.

« Ah, Blue ! Quel plaisir de te revoir ...
- Black, aurais-tu donc peur des serpents pour fuir de la sorte ? »

Elle avait préféré interrompre James, peu ravie par l'emploie de son diminutif. Seul son père avait l'autorisation de l'appeler ainsi et elle se demandait quelle potion son ami avait-il pu avaler pour l'interpeller de la sorte. A moins de vouloir mourir, il savait que ce n'était pas un risque à prendre.

Avant que Black n'ait pu répondre, Narcissa s'était levée sans doute dans le but d'éviter de côtoyer des Gryffondors. A moins qu'elle ne chercha à éviter la dispute, réaction parfaitement compréhensible aux yeux d'Elana. L'insolent Maraudeur avait beau être un renégat, il n'en demeurait pas moins son cousin ce qui devait rendre la situation assez dérangeante pour elle.
La demoiselle qui l'accompagnait voulu l'imiter mais, sur un ton sec, la blonde l'obligea à se rasseoir. Elana apprit ainsi qu'elle s'appelait Emily mais qu'elle ne comptait pas réellement pour une personne agréable aux yeux de Narcissa. Ce dont, une fois encore, elle se moquait éperdument mais qui pourrait lui éviter de commettre un impair en présence de sa camarade. Une fois cette dernière sortie, Elana daigna se tourner vers les Gryffondors.

« James. Nous ne nous sommes guère vus, cet été. Il faut dire que nous avons été fort occupés et que je n'ai seulement pas pu songer à te proposer une sortie. »

En disant cela, elle ne put s'empêcher de lancer un coup d'oeil à Rabastan. Ils avaient passé tellement de temps ensemble, effectués tant de tâches pour le Maître, qu'il lui semblait faire désormais partie intégrante de son corps. Comme une sorte d'extension qui connaîtrait ses plus sombres secrets, qui l'aurait vu dans ses pires moments. De tous les gens qu'elle côtoyait, Rabastan était à présent celui qui pourrait la décrire au mieux. Même ceux qui l'avaient vu grandir ne pouvaient connaître autant de facettes de sa personnalité.

« J'ai cependant été surprise de ne point croiser Black. Après tout, sa famille aurait dû l'envoyer effectuer son... stage estival, non ? »

Comme tous les enfants issus des Nobles Familles, Elana avait entendu parler de la fugue du Gryffondor. Elle avait même pu passer toute une soirée à observer Walburga clamer haut et fort qu'elle ne pouvait avoir mis cet enfant au monde, qu'il souillait le nom des Black et qu'il aurait dû être tout bonnement rayé de leur arbre généalogique. Ce qui, à n'en pas douter, avait été fait dès son retour au manoir familial. Et que dire de Bellatrix ? Elle avait passé deux mois à monter des centaines de plan pour traquer, torturer et assassiner son cousin afin de lui faire payer l'opprobre qu'il jetait sur les siens.

- Black, aurais-tu donc peur des serpents pour fuir de la sorte ?

Il aurait du s'en douter. Elana Wild ne ratait pas une occasion d'échanger avec lui, que ce soit sur un ton sarcastique ou bien intéressé. Il lui était déjà arrivé d'avoir avec elle des discussions passionnées sur tel ou tel sujet, sans qu'ils soient forcément d'accord sur l'idée générale. Mais aujourd'hui, il regrettait amèrement d'avoir absolument tenu à la voir. Il n'était pas du tout en état de l'affronter. Fatigué, encore un peu souffrant, clairement pas patient, il savait déjà que s'il restait, ça allait dégénérer. Mais il s'était arrêté dans le couloir lorsqu'il l'avait entendu prononcer son nom. Il avait eu le temps de voir Rabastan Lestrange dans le compartiment, ainsi qu'une chevelure blonde, qui devait appartenir à sa cousine Narcissa même s'il n'en aurait pas juré, et savait d'avance que c'était une très mauvaise idée que de répondre. Aussi inspira-t-il profondément avant de faire mine de reprendre son chemin. Mais déjà, la voix de la jolie brune résonnait de nouveau :

- James. Nous ne nous sommes guère vus, cet été. Il faut dire que nous avons été fort occupés et que je n'ai seulement pas pu songer à te proposer une sortie.

Le nous surpris Sirius. Il eut envie de regarder par dessus son épaule pour savoir de qui elle parlait ainsi mais il se ravisa et poursuivit sa route, dans l'idée de trouver des chocogrenouilles. Mais c'aurait été trop beau, évidemment. La voix d'Elana retenti de nouveau, plus sardonique que jamais.

- J'ai cependant été surprise de ne point croiser Black. Après tout, sa famille aurait dû l'envoyer effectuer son... stage estival, non ?

Sirius entendit James étouffer une exclamation de surprise mêlée d'angoisse. Mais il était trop tard. Impulsif et particulièrement violent sur le sujet de sa famille, le jeune Black se retourna et marcha droit sur le compartiment ouvert, prenant soin de contourner James au passage. Il entra dans la petite cabine sans daigner jeter un regard à Rabastan avant de se planter devant la jollie brune et de déclarer d'un ton abrupte, s'efforçant de canaliser la colère sourde qui animait son être :

- Tu veux me faire avaler que t'es pas au courant ? Toi ? Tout le monde sait que tu as des affinités particulières avec toutes les familles de sangs-purs adeptes de magie noire. Que ce soit les Lestrange, dont un des héritiers est ici présent ...

Il ignorait toujours l'interpellé et poursuivit d'un ton cassant :

- Ou encore les Black, dont curieusement je suis le seul que tu ne peux, ou du moins que tu ne pouvais pas souffrir. J'imagine donc que tu sais ce qui m'est arrivé cet été. Enfin ... une partie.

Il manqua d'ajouter quelque chose mais se mordit la lèvre inférieure juste à temps, retenant de justesse une phrase qui n'aurait pas manqué de révéler les tortures dont il avait fait les frais. Il ne voulait pas qu'on sache. Déjà, le simple fait que James ait vu les marques cet été lui était difficile à tolérer, mais si en plus d'autres venaient à être au courant ... Il n'oserait plus jamais se montrer. Il ne supportait pas l'idée d'être mutilé, diminué. L'idée qu'on puisse éprouver de la compassion pour lui après ce qu'il avait vécu. La pitié, il n'en voulait pas. Il enchaina alors d'un ton plus posé mais toujours aussi incisif :

- Et puis tu t'étonnes de ne pas m'avoir croisé ... Mais tu as dit toi-même que tu étais fort occupé.

La dernière phrase aurait presque pu sonner comme un reproche. Elana avait une étrange réputation, au sein de l'école. Sirius n'ignorait pas qu'elle faisait partie du cercle de Lord Voldemort, même s'il ne connaissait pas son niveau précis. Il savait qu'elle n'était surement pas une sainte. A vrai dire ... Personne n'aurait pu faire l'erreur de prendre la jeune femme pour une innocente. Non, personne. Il serra les points et se détourna alors brusquement, revenant vers James en affichant une mine profondément rageuse, hargneuse. Sourcil froncé, front plissé et yeux luisants, il faisait penser à un lion enragé. Il avait encore réagit sans réfléchir, sans prendre en compte la personnalité de la personne à qui il s'adressait. Un fugitif sourire effleura ses lèvres, l'espace une fraction de seconde. Elana Wild rétorquerait.

Finalement, ils l'auraient, leur joute de rentrée.

A peine ses mots avaient-ils pris un sens dans l'esprit des autres que James poussait une sorte de gémissement douloureux et effrayé. Elana arqua un sourcil, surprise par un tel manque de maîtrise de la part de son ami, autant que par la crainte qui déformait ses traits. Il ne pouvait avoir réagit de la sorte par rapport à ses sous-entendus. Il savait depuis longtemps qu'elle n'était pas fréquentable, le savait même mieux que quiconque puisque leurs mères avaient été amies et qu'il s'agissait là de la seule raison pour laquelle Tom avait accepté de fréquenter les Potter. Aussi ne pouvait-il avoir peur que de la réaction de Black ...

Ce dernier venait en effet de faire brutalement volte-face et d'entrer dans le compartiment, une rage violente peinte sur le visage. Sans daigner observer les autres, il vint se planter devant elle, beaucoup trop près pour leur bien-être respectif.

« Tu veux me faire avaler que t'es pas au courant ? Toi ? Tout le monde sait que tu as des affinités particulières avec toutes les familles de sangs-purs adeptes de magie noire. Que ce soit les Lestrange, dont un des héritiers est ici présent ... »

Il ignora encore une fois Rabastan qui, malgré l'agitation, se trouvait encore plongé dans son ouvrage et ne put donc pas noter l'impolitesse. Un instant, Elana admira le sang-froid et le détachement de son ami; elle aurait aimé pouvoir supporter aussi bien que lui les hurlements de Black. Ou de quiconque, d'ailleurs.

« Ou encore les Black, dont curieusement je suis le seul que tu ne peux, ou du moins que tu ne pouvais pas souffrir. J'imagine donc que tu sais ce qui m'est arrivé cet été. Enfin ... une partie. »

Elle le savait, effectivement. Mais contrairement à ce qu'il croyait, il n'était certainement pas le seul Black qu'elle ne pouvait souffrir. Bellatrix était folle à liée, toujours partisane de la violence, et se traînait lamentablement aux pieds du Seigneur des Ténèbres, guettant le moindre geste un peu familier de sa part. La mère du Gryffondor ne possédait aucunement l'éducation attendue à son rang et passait la plupart des soirées à boire et à se comporter comme la dernière des roturières. Les autres membres de la famille lui était, pour ainsi dire, parfaitement indifférents si on excluait la belle Narcissa.

« Et puis tu t'étonnes de ne pas m'avoir croisé ... Mais tu as dit toi-même que tu étais fort occupé. »

Le ton de reproche qu'il avait employé lui parut étrange mais elle préféra ne pas relever. Les états d'âme de Black lui importait bien peu et si elle le provoquait à longueur de temps, ce n'était que pour le plaisir de se disputer avec un être doté d'une personnalité et ayant du répondant. Elle ne s'interrogeait jamais sur le mal que ses piques pouvaient provoquer, simplement heureuse de toucher juste.

« Effectivement, ta mondaine génitrice s'est fait un devoir d'étaler à la face du monde les problèmes intimes ébranlant sa famille. Ce fut fort distingué de sa part, d'ailleurs. »

A ces mots, Rabastan émit un léger rire, rapidement camouflé en raclement de gorge. Il était de notoriété publique que ces deux-là ne s'entendaient pas, malgré les liens qui les unissaient de part Bellatrix et Rodolphus. Outre cette animosité, le cadet des Lestrange avait tout autant souffert qu'Elana du comportement de Walburga et pouvait bien s'accorder une moquerie en dédommagement.

« Mais ne crois pas que tu sois le seul à connaître cela, Black. La seule différence tient dans le fait que nous nous relevons et poursuivons nos chemins la tête haute. »


Que ce soit en punition pour leurs mauvais comportements ou bien en entraînement pour les endurcir, Elana doutait qu'un seul jeune Sang-Pur ait jamais pu échapper à l'humiliation de la torture. Black avait simplement été le seul à faire entendre sa voix sur un tabou de société que mêmes les traîtres à leur sang se gardaient bien de dévoiler.

Bien entendu, elle ne l'aurait pas laissé filer aussi facilement. Il attendit donc la réponse qui ne tarderait pas, une légère lueur amusée au fond de ses yeux gris orage.

- Effectivement, ta mondaine génitrice s'est fait un devoir d'étaler à la face du monde les problèmes intimes ébranlant sa famille. Ce fut fort distingué de sa part, d'ailleurs.

Le léger ricanement que Rabastan fit passer pour un raclement de gorge n'échappa à Sirius mais il ne releva pas. Les Lestrange et les Black avaient beau se fréquenter souvent et entretenir l'illusion d'une amicale fraternité, certains membres ne pouvaient pas se souffrir. Et il était particulièrement bien placé pour savoir que sa mère n'était pas du tout, du tout, du tout dans les bonnes grâces de la famille Lestrange. Mais ils la toléraient tout de même, comment pourrait-il en être autrement ? Épouse suprême du dernier héritier réel des Black, il fallait bien composer avec elle ... Orion Black avait tous les pouvoirs, du fait de son nom. Et puisque lui, Sirius, refusait de suivre le chemin tout tracé auquel on le prédestinait, il semblait se considérer comme l'unique Black digne de ce nom, ignorant en cela son second fils, le parfait Regulus Black. Enfant, Sirius avait toujours éprouvé une certaine pitié pour son petit frère, qui faisait tout ce qu'on attendait de lui et plus encore mais qui ne récoltait pas une once d'attention, d'affection. Il avait fallu que lui quitte la maison pour qu'enfin ses géniteurs prennent conscience du fait qu'il restait encore un Black ... Même s'il n'était pas celui qu'on attendait.

- Mais ne crois pas que tu sois le seul à connaître cela, Black. La seule différence tient dans le fait que nous nous relevons et poursuivons nos chemins la tête haute.

Cette fois, Sirius se raidit. Il dut faire un effort de volonté particulièrement puissant pour éviter de se rebeller avec violence contre cette fausse vérité générale, énoncée d'un ton trop désinvolte à son goût. Il devait à tout prix éviter de révéler ce qu'il avait subit, mais il ne pouvait pas laisser Elana dire que d'autres subissaient cela. Non, personne n'avait jamais osé se rebeller à ce point contre le sang des ténèbres, refuser ouvertement de faire partie des rangs sombres. Personne d'autre que lui n'avait fait entendre sa voix. Il était le seul à avoir souffert comme cela. Des séances de tortures proprement inhumaines depuis l'âge de huit ou neuf ans, qui n'avaient cessé de prendre de l'ampleur pour dépasser le stade de l'imaginable au fur et à mesure qu'il devenait un homme et que son corps pouvait encaisser plus de douleur, de dommage.

Expulsant doucement l'air de ses poumons dans une tentative pour se calmer, Sirius se força à répliquer d'un ton neutre, sans aucune émotion :

- Je crois que si, je suis le seul. Je suis le seul à m'être rebellé. Et crois moi Elana ... Personne n'imagine ce que c'est.

Il en avait déjà beaucoup trop dit. Mais il n'était pas capable de bouger, pour l'instant. S'efforçant de se calmer, il inspirait et expirait profondément en essayant de se convaincre que ce n'était qu'une discussion comme une autre. Avec un sujet juste un peu plus sensible, mais par rapport auquel il devait absolument prendre un peu de recul, éviter de paraître trop impliqué. Mais comment faire quand le sujet n'était autre que lui-même ?

Lentement, d'un air assuré qu'il était loin de ressentir, il se retourna pour faire face à la jeune femme.

Toujours dos à elle, Black se tendit brutalement. Encore une fois, elle avait semblé toucher juste et se réjouissait de la tempête qui n'allait pas tardé à s'abattre sur sa personne. Elle se moquait qu'il se permette les pires familiarités envers elle, du moment qu'il perdait le contrôle. Le parfait Black allait perdre de sa superbe, encore une fois., et il était seulement regrettable que ses nombreuses admiratrices ne soient pas présentes pour admirer la scène. Bien qu'il ne fasse aucun doute qu'elles l'aient défendu ...
Prenant le temps de soupirer, il ne daigna toujours pas lui faire face pour répondre.

« Je crois que si, je suis le seul. Je suis le seul à m'être rebellé. Et crois moi Elana ... Personne n'imagine ce que c'est. »

Alors que le Gryffondor pivotait pour l'observer, Elana sentit une vague de colère lui tordre les entrailles. L'imbécile avait l'insolence de prétendre être le seul à subir humiliations et tortures devant des Mangemorts en devenir, des enfants dressés à se montrer fier de leur sang et à faire couler celui de ceux qui ne répondaient pas à leurs critères. Sous le seul prétexte qu'il avait été incapable de mettre sa fierté de côté pour sauver sa peau, contrairement aux autres, il se croyait martyr de la noble cause de l'égalité sociale et faisait de leurs souffrances une simple partie de plaisir en comparaison des siennes.
Une bordée d'injures brûla un instant les lèvres de la jeune femme mais elle parvint à les contenir, consciente de la satisfaction qu'un tel manque de retenue provoquerait chez Black.

« Tais-toi, Black.. Tu te penses pétri de nobles intentions mais vous ne valez pas mieux que nous, toi et tes jugements imbéciles. »

Elle n'avait pu s'empêcher de parler d'un ton dur, dénué de toute ironie, crachant presque ses mots à la figure du Maraudeur. Par moment, il lui semblait impensable que des êtres tout aussi bornés et méprisants puissent juger les agissements de son père. Hormis leurs opinions opposées, qui avait-il de différent chez lui ? Il se montrait tout aussi fidèle aux préjugés que l'autre camp mais, aux yeux de tous, il demeurait l'unique dangereux extrémiste.

Les défenseurs du Bien semblaient toujours croire que tous les Mangemorts méritaient de souffrir, voire même qu'ils y prenaient goût. Les malades tels que Bellatrix devaient certainement satisfaire cette croyance populaire mais ils étaient bien les seuls. Combien d'entre-eux avaient demandé grâce lors de l'apposition de leur Marque ? Et surtout, combien étaient-ils à se battre par réelle conviction ? Elana n'excluait pas la possibilité d'être aveuglée par sa propre expérience mais elle restait persuadée que bon nombre d'enfants de Sangs-Purs souffraient tout autant en obéissant que Black en se rebellant. Ils subissaient les mêmes tortures, les mêmes lavages de cerveaux, connaissaient des désillusions similaires mais se devaient, en plus, de suivre une voie à laquelle ils n'adhéraient pas et qui les contraignaient à verser le sang.

« Tu t’enorgueillis d'avoir eu la force de tes convictions mais ta petite insurrection ne vaut ni plus, ni moins que l'obéissance des autres. »

Le fixant, elle voulut ajouter que certains lui paraissaient même plus respectables que lui pour la simple et bonne raison qu'ils faisaient passer les leurs avant leur bonheur égoïste mais elle se retint. De tels propos auraient pu la mettre en danger tout en laissant croire à Black qu'elle méprisait son acte. Ce qui n'était pas le cas, bien qu'elle aurait préféré embrasser le calmar géant plutôt que de le lui avouer.

Réalisant que ses mains tremblaient, Elana détourna le regard et revint s'asseoir aux côtés de Rabastan.

Il perçu une lueur de profonde colère dans les yeux de la belle brune. Des flammes de hargne pure, de haine presque, mais il pressentait que ce n'était pas entièrement contre lui. Il avait l'impression désagréable qu'elle cherchait à la fois à protéger son camps et en même temps à ne pas ... minimiser sa rébellion à lui. Il ne pouvait certes pas l'en blâmer, après tout. Il ne connaissait pas son histoire. Mais il savait qu'elle faisait partie des meilleurs. Des plus meurtriers. Il lui en voulait à un point inimaginable, pour ça, mais il ne l'aurait jamais avoué. Il n'aurait pas été foutu d'expliquer en quoi le fait qu'elle soit la meilleure dans ce domaine le blessait autant. Il ne pouvait pas expliquer cette cruelle douleur qu'il ressentait lorsqu'il y pensait, lorsque le sujet était évoqué. Il lui en voulait d'être dans l'autre camp. Il lui en voulait tout en sachant que si elle n'y était pas, il ne l'apprécierait certainement pas autant.

- Tais-toi, Black.. Tu te penses pétri de nobles intentions mais vous ne valez pas mieux que nous, toi et tes jugements imbéciles.

Il se fit violence pour encaisser sans manifester quoi que ce soit, tâche difficile étant donné qu'il connaissait par coeur le ton dur et tranchant qu'elle venait d'employer. Le ton qu'elle utilisait lorsqu'elle défendait ses opinions. Le ton qui laissait présager une dispute houleuse, difficile. Sans issue. Il n'y aurait jamais d'issue, pour ce sujet là. Jamais.

- Tu t’enorgueillis d'avoir eu la force de tes convictions mais ta petite insurrection ne vaut ni plus, ni moins que l'obéissance des autres.

Il nota un léger tremblement, chez la jeune femme. Un peu surpris, il baissa les yeux sur ses mains et remarqua qu'en effet, ses doigts fins et pâles étaient agités de petits spasmes. Elle se détourna alors et alla s'asseoir près de son ami Rabastan, mangemort confirmé depuis déjà quelques années et qui ne cachait pas son zèle, pas plus que sa nature. Sirius n'avait jamais apprécié cette population mais il devait admettre qu'il était un peu admiratif, vis à vis du grand Lestrange. Contrairement à son frère ou a sa future belle-soeur, il se dégageait de lui une aura plus ou moins normale. Sombre et meurtrière, certes, mais de celles qui suivent les hommes de parole. Il avait voué sa vie à une cause et ne regardait pas en arrière. Alors qu'il se faisait la reflexion que, de tous les mangemorts et futurs-mangemorts qu'il avait cotoyé jusqu'ici, Rabastan était probablement le plus franc, à sa façon, l'observé leva les yeux de son livre et les braqua sur le grand Black en demandant d'un ton ironique :

- Un problème, Black ? Tu sembles fasciné par ma personne, d'un seul coup.

Esquissant une grimace de dégoût, Sirius secoua la tête et ne se donna pas la peine de répliquer, préférant à la place se tourner vers la jolie brune qui l'avait vertement tancé quelques secondes plus tôt. Rabastan referma son livre avec un claquement sec qui trahissait son irritation. Sirius esquissa un bref sourire mais prit son temps pour déclarer, doucereux comme jamais :

- Ma rébellion, Elana, vaut au contraire, mieux que l'obéissance désespérée et obligée de tous les autres enfants voués à suivre les rangs de ton maître. Il n'y a qu'a regarder mon frère, pour cela. Sa volonté de plaire à mes géniteurs l'a poussé à suivre cette voie à ma place. Mais si nous prenions la peine d'aller lui demander son avis sur la question ... Je ne suis pas persuadé qu'il répondrait selon vos désirs. Il en va surement de même pour le noble et farouche Lucius Malefoy. La rumeur court qu'il ne voudrait pas rejoindre les rangs, au grand dam de sa famille et du Maître ...

Il marqua une pause et glissa un regard sur Rabastan, qui avait légèrement tressaillit au sujet de Malefoy. Ainsi, ils n'étaient pas au courant ... Surprenant. Sirius reprit alors, d'une voix calme mais glacée :

- Alors Elana. Entre se rebeller et assumer ses convictions et faire le petit chien pour plaire et assurer un honneur dont on ne se soucie pas vraiment ... Chacun sa vie. Chacun ses choix. Mais tu connais mon avis sur la question.

Il se redressa et glissa les mains dans ses poches avant de faire volte face pour regagner la porte, ou l'attendait James. Le maraudeur à lunette affichait une mine à la fois choquée, surprise et résignée. Il n'aurait de toute manière rien pu empêcher, alors il s'était borné à suivre l'altercation sans s'y glisser, patientant jusqu'à la fin qu'il espérait proche. Mais dans les yeux de son ami, Sirius lu une lueur de reproche. Il haussa les épaules. Peu lui importait, au fond.

Coinçant les main traîtresses entre ses genoux, Elana appuya légèrement son épaule contre celle de son voisin, avide de réconfort. Elle avait été éduquée pour ne jamais montrer ses sentiments, pour rester impassible en toute circonstance, mais elle n'était pas aussi forte que prévu. Depuis qu'ils avaient commis toutes ses horreurs ensemble, elle se sentait suffisamment proche de Rabastan pour se permettre un vague laisser-aller, pour oublier à quel point l'affection la mettait mal à l'aise et tenter de calmer ses émotions les plus fortes. Le jeune homme ne laissa rien transparaître sur son visage qui puisse laisser à penser qu'il avait perçu leur contact contrairement au regard insistant que lui lançait Black et qui l'obligea à relever la tête.

« Un problème, Black ? Tu sembles fasciné par ma personne, d'un seul coup. »

Malgré la grimace de dégoût de l'intéressé, Elana se demanda si son ami n'avait pas visé juste. Le Maraudeur n'avait aucune raison de se trouver dans leur compartiment ; il la détestait et ne parlait jamais à sa cousine. Au demeurant, il aurait certainement fallu le traîner par la peau des fesses pour qu'il daigna frayer avec des Serpentards or il n'avait parut suivre James en toute conscience, sans mauvaise volonté. Ce qui pouvait bien l'attirer chez Rabastan restait, cependant, un mystère. Il était bel homme, cela allait sans dire, mais Black était connu pour ne jamais se repaître des contacts avec la gente féminine. Il aurait été étrange qu'il s'intéressa brutalement aux hommes, à moins qu'il n'ait eu toutes ces relations pour camoufler ses réels penchants, bien peu tolérés dans les milieux les plus bourgeois. Être le fils renié devait déjà suffire à sa réputation et il n'avait pas dû vouloir ajouter à ses malheurs.
La voix du concerné la tira soudainement de ses pensées.

« Ma rébellion, Elana, vaut au contraire, mieux que l'obéissance désespérée et obligée de tous les autres enfants voués à suivre les rangs de ton maître. Il n'y a qu'a regarder mon frère, pour cela. Sa volonté de plaire à mes géniteurs l'a poussé à suivre cette voie à ma place. Mais si nous prenions la peine d'aller lui demander son avis sur la question ... Je ne suis pas persuadé qu'il répondrait selon vos désirs. Il en va surement de même pour le noble et farouche Lucius Malefoy. La rumeur court qu'il ne voudrait pas rejoindre les rangs, au grand dam de sa famille et du Maître ... »

Contre son épaule, Rabastan tressaillit, ce qui n'échappa guère au regard inquisiteur du Gryffondor. Elana, quant à elle, se moquait éperdument des intentions de Lucius. Il ne représentait pas une perte suffisamment importante pour qu'elle s'inquiéta de la réaction de son père et, au fond, il s'agissait-là de tout ce qui lui importait. Elle se fichait des Mangemorts, de leurs convictions et de leur dévotion. Tout ce qu'elle désirait était de contenter son géniteur, avide de pouvoir et de grandeur. Le nom des Malefoy aurait apporté un prestige supplémentaire à son armée mais l'intérêt s'arrêtait là. Rabastan devait certainement craindre pour la vie de son ami qui, il est vrai, risquait d'être écourtée de manière considérable.

« Alors Elana. Entre se rebeller et assumer ses convictions et faire le petit chien pour plaire et assurer un honneur dont on ne se soucie pas vraiment ... Chacun sa vie. Chacun ses choix. Mais tu connais mon avis sur la question. »

Elle commençait à peine à maîtriser sa colère qu'il appuyait encore une fois là où il ne fallait pas. Et il avait le culot de lui tourner le dos, en plus !
Sans réfléchir à ce qu'elle faisait, Elana se redressa vivement et tenta de se jeter sur Black, le poing levé, bien décidée à lui faire mal au point qu'il la supplia de mourir. Mais Rabastan fut plus rapide qu'elle, son avznt-bras rencontrant douloureusement l'estomac de la jeune femme. Le souffle coupé, des larmes de suprise au bord des yeux, elle lança un regard d'incompréhension à son camarade. Il aurait dû la laisser faire, lui permettre de corriger cet imbécile qui se permettait de juger leur sens de l'honneur et l'amour qu'ils portaient à leurs proches. Elle ne pouvait pas lui cracher toute la vérité à la figure; il ne lui restait que ses poings pour lui faire payer son erreur et Rabastan la retenait ...

Suffocante, la Serpentard fit signe qu'elle renonçait et son ami la relâcha, lui permettant de se rasseoir. Elle retint de justesse le réflexe qui la poussait à porter une main à son estomac, peu désireuse de montrer que le coup avait réussi à la blesser. A la place, elle foudroya Rabastan du regard, ne comprenant réellement pas ce qui avait pu lui passer par la tête mais lui reprochant son geste. Il aurait pu la retenir plus délicatement, éviter de l'éventrer devant un tel public ...
Une fois sa respiration maîtrisée et sa colère maîtrisées, Elana leva les yeux en direction de James qui n'avait pas bougé depuis le début de l'altercation. Il paraissait mal à l'aise, comme regrettant les propos de Black à sa place.

« Je te reverrai plus tard, James. Tes... amis ne sont pas à mon goût, j'attendrai donc de te voir seul. »

Tout en parlant, elle avait lancé un regard méprisant à Black, bien maigre consolation face à l'affront qu'il venait de lui faire. Elle avait un honneur, elle ne suivait pas son père par crainte mais par amour. Elle avait déjà payé le prix de ce choix, le paierait encore qu'il s'empare du pouvoir ou soit stoppé dans sa sanglante avancée. La culpabilité, les cauchemars et la condamnation qui ne manquerait pas de tomber en cas d'arrestation seraient toujours là pour lui rappeler à quel point ses désirs de petite fille étaient malsains et dangereux. Et malgré cela, elle poursuivait sur la voie des Ténèbres, le coeur emplit d'admiration pour son père, ses sentiments si purs entachés par le sang qu'ils la forçaient à verser.
Black aurait du mourir pour avoir osé la traiter de chien. Elle était ...

« ... plus dévouée que le meilleur des canidés, marmonna-t-elle. »